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M’Ap Boulé est un spectacle puissant qui combine le récit et la chanson de Nancy Denis, Haïtienne et Australienne née à Sydney. Tout au long de ce spectacle de 90 minutes, Nancy partage son expérience d’être née en Australie de parents haïtiens et son combat pour l’acceptation de qui elle est et de qui elle aime.

M’Ap Boulé Nancy Denis — Image: Claudio Raschella

Le titre du spectacle M’Ap Boulé signifie « Je suis en feu » en créole haïtien. Il s’agit d’un spectacle exaltant et joyeux. Nancy Denis est une conteuse puissante qui entraîne le public dans un tourbillon d’émotions, passant du rire à la larme à l’œil, puis au rire à nouveau. Mais elle n’est pas seulement une conteuse poétique et puissante, elle a aussi une voix de chant incroyable.

Nancy Denis est accompagnée sur scène par Kween G, MC et artiste hip-hop, Victoria Falconer aux clés et à la scie musicale, et Mick Stuart à la batterie. La musique que l’on entend tout au long de M’Ap Boulé a été composée par le regretté Carl St Jacques. La relation entre Kween G et Nancy Denis lorsqu’ils se produisent ensemble sur scène est merveilleuse et fait chaud au cœur.

Le décor est simple mais efficace – des bougies ornent des blocs blancs de différentes hauteurs au fond de la scène. Ce décor, associé à l’éclairage, contribue à transmettre visuellement la chaleur que l’on ressent face à M’Ap Boulé. Denis change plusieurs fois de costume – elle ouvre le spectacle dans une combinaison décolletée, puis se glisse dans une robe orange fluide à bretelles.

Denis n’hésite pas à poser au public, majoritairement blanc, des questions difficiles telles que : quand l’Australie a-t-elle été créée en tant que nation ? Qu’est-ce que la terra nullius ? Qu’en est-il de la génération volée ? Un air maladroitement entraînant sur le génocide (gen to the side, gen-o-cide) risque de vous rester dans la tête longtemps après la fin du spectacle.

La fierté de Nancy pour ses origines haïtiennes est évidente dès le début du spectacle, le public étant invité à se lever pour l’hymne national – celui d’Haïti bien sûr ! Elle porte le drapeau haïtien sur ses chaussures et sur son dos. Cependant, elle n’a pas toujours été fière d’être haïtienne. Parfois, elle avait très envie d’être acceptée par ses camarades d’école à la peau blanche et d’attirer l’attention des garçons blancs. Tout cela dans le but de s’assimiler.

Dès l’âge de trois ans, Nancy Denis savait qu’elle venait des guerriers : son père lui racontait qu’Haïti était devenue la première république noire et que ses ancêtres avaient dû commettre des meurtres pour se libérer de l’esclavage. Elle nous raconte qu’à l’âge de 3 ans, elle ne pouvait faire le lien entre le bien et le mal qu’avec Mustafa et Scar du Roi Lion, mais son père s’est assuré qu’elle comprenne que le meurtre des soldats français était une question de justice.

Le fait de savoir que ses ancêtres se sont battus si durement pour se libérer de l’esclavage et obtenir leur indépendance a façonné Nancy Denis et l’a toujours accompagnée dans ses luttes. Elle a assumé leur force et entendu leur voix, même dans ses heures les plus sombres.

Sa chute dans les profondeurs du désespoir est décrite avec puissance dans une chanson dans laquelle elle vous demande de:

“save me, save me from myself

catch me, catch me

hold me, hold me”

(sauvez-moi, sauvez-moi de moi-même

attrape-moi, attrape-moi

tiens-moi, tiens-moi)

Il faut saluer le courage de Nancy Denis pour avoir abordé un sujet que tant de gens fuient encore. Dans M’ap Boulé, il y a beaucoup d’espoir et de bonheur de part et d’autre du désespoir et de la tristesse, et Nancy Denis parle avec poésie de la sortie de la cage de sécurité. Il s’agit d’une narration puissante, d’un partage de l’espoir et de la joie. Nous ne saurions trop recommander M’ap Boulé.