Le Fil vous entraîne dans un drame judiciaire inoubliable

Critique Le Fil
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Le Fil est un film captivant basé sur l’histoire vraie du procès d’un homme accusé d’avoir tué sa femme. Co-écrit, réalisé et interprété par Daniel Auteuil (Un silence, La petite vadrouille, Adieu M. Haffmann, La belle époque), il suit de près le blog et le livre de l’avocat français Jean-Yves Moyart (également connu sous le nom de Maître Mo) intitulé Au guet-apens : chroniques de la justice pénale ordinaire.

Critique Le Fil

Nicolas Milik (Grégory Gadebois, Louise Violet, Les choses simples, Délicieux), mari et père de cinq enfants, est accusé du meurtre de sa femme. Maître Annie Debret (Sidse Babett Knudsen, série danoise Borgen) reçoit un appel du commissariat lui demandant de venir interroger une personne en garde à vue. Elle est avocate pénaliste de garde, épuisée, et demande à son mari, Maître Jean Monier (Daniel Auteuil), également avocat pénaliste, de la remplacer, juste pour la phase de garde à vue, avec l’intention de prendre le relais le lendemain.

 

Maître Monier est un avocat qui n’a représenté personne devant le tribunal pénal depuis 15 ans, après s’être trop impliqué personnellement dans la défense d’un homme qu’il croyait innocent — un homme qu’il a fait acquitter, mais qui a ensuite récidivé. Monier rencontre Milik et dit ensuite à Annie qu’il n’est « ni un coupable crédible ni un innocent évident ». Pourtant, Milik le touche profondément, et Monier décide, après 15 ans passés à éviter les tribunaux, de prendre cette affaire en charge.

 

Le Fil se concentre sur un procès tendu de trois jours. En marge de celui-ci se déroule l’histoire d’un jeune torero dont le père craint qu’il ait des démêlés avec la justice. Si cette intrigue secondaire semble largement superflue sur le plan narratif, elle semble vouloir faire écho au drame central : l’arène, tout comme la salle d’audience, est un lieu où l’habileté, le courage et la performance sont mis à l’épreuve sous le regard intense du public. Les deux sont chargés de danger, de tromperie et de risque : une confrontation ritualisée où les enjeux ne sont rien de moins que la vie, la mort ou la ruine. En fin de compte, cependant, ce fil symbolique semblait plus être un remplissage thématique qu’un véritable enrichissement, n’ajoutant que peu à l’impact du film.

Grégory Gadebois and Daniel Auteuil in The Thread ©Palace Films
Grégory Gadebois et Daniel Auteuil dans Le Fil ©Palace Films

L’ami de Milik, Roger Marton (le chanteur-compositeur Gaëtan Roussel), propriétaire d’un bar, est coaccusé avec lui du meurtre. Un poing américain fraîchement lavé a été retrouvé sous son évier, et il a été entendu dire à Milik au bar la veille au soir qu’il devrait en finir avec elle, ajoutant que s’il avait été à sa place, il l’aurait déjà fait. Sa femme ne peut pas expliquer ce qu’il a fait entre 1 heure du matin, heure de fermeture du bar, et 3 h 30, heure à laquelle il s’est effondré dans son lit en disant « putain je l’ai fait » sans donner d’explication avant de s’endormir.

 

La sœur du défunt, Audrey Girard, est interprétée par Aurore Auteuil, la fille de Daniel Auteuil, qui nous rappelle Elisabeth Moss dans The Handmaid’s Tale. Contrairement à Monier, Audrey est convaincue de la culpabilité de Milik et ne parvient pas à contenir ses émotions et ses pensées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du tribunal.

 

La cinématographie est souvent saisissante. Les séquences tournées au tribunal sont parfois filmées dans un style granuleux, presque comme si nous regardions des archives datant de plusieurs décennies. Il y a également une scène mémorable entre Milik et Monier dans la prison, où nous ne voyons le visage de Monier qu’à travers le reflet dans la vitre qui les sépare. La bande originale de Gaspar Claus, composée de violoncelle, violon et piano classiques, est à la fois envoûtante et pleine de suspense aux moments clés.

 

Comme toujours, Auteuil et Gadebois livrent des performances exceptionnelles dans Le Fil. Équilibrant subtilité émotionnelle et moments de tension captivante, ils dominent l’écran et ancrent le drame dans la réalité. Gadebois est particulièrement convaincant dans le rôle de Milik, un mari et père opprimé qui doit s’occuper de cinq enfants tandis que sa femme alcoolique ne lui apporte que peu de soutien, incarnant à la fois une résilience tranquille et un désespoir à peine dissimulé. Monier est parfois exaspéré par son client, qui refuse de participer à la reconstitution et ne veut pas pointer du doigt son coaccusé, Roger, malgré les preuves accablantes qui pèsent contre lui. Ce sont des moments qu’Auteuil joue avec un mélange subtil de frustration, de retenue et de devoir professionnel.

Daniel Auteuil in The Thread ©Palace Films
Daniel Auteuil dans Le Fil ©Palace Films

Le film gagne en authenticité et en résonance émotionnelle auprès du public, qui sait qu’il est basé sur une histoire vraie. Il ne s’agit pas seulement de l’histoire d’un procès pour meurtre, mais aussi de celle d’un homme qui ravive sa passion pour son métier, au risque de retomber dans le même piège, convaincu que son travail consiste à sauver son client, et pas seulement à le défendre. Au cœur du film se trouve le véritable risque moral : le danger pour un avocat de franchir la ligne floue qui sépare l’avocat du sauveur.

 

À titre d’aparté, pour le public hors de France, l’atmosphère sobre des tribunaux français, avec leur cérémonie formelle et l’absence d’objections spectaculaires, offre un contraste intrigant avec les drames judiciaires anglo-américains plus théâtraux.

 

Malgré une intrigue secondaire symbolique qui ajoute plus de décoration que de profondeur, Le Fil est un drame judiciaire tendu et intelligent, porté par deux performances remarquables et une ligne morale discrètement dévastatrice. Captivant du début à la fin, Le Fil est un film incontournable pour tous ceux qui aiment les drames judiciaires, ont un penchant pour les crimes réels ou veulent simplement voir deux des meilleurs acteurs français au sommet de leur art.

4.5 CROISSANTS

Matilda Marseillaise a assisté à une projection en avant-première pour les médias du film Le Fil

 

Le Fil sortira dans les salles australiennes le 28 août 2025 sous le titre The Thread (qui signifie également « Le Fil ») . Il est sorti en France le 11 septembre 2024. Le film est connu sous le titre An Ordinary Case dans tous les pays anglophones à l’exception de l’Australie.

 

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