CRITIQUE: The Pearl Fishers (Les Pêcheurs de Perles) à l’Adelaide Festival Theatre

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Par un jeudi gelé, on a pris abri dans la chaleur du Adelaide Festival Theatre rénové pour le troisième spectacle de la production de « Les Pêcheurs de Perles » (The Pearl Fishers) du State Opera of South Australia.

 

Cette fois-ci dirigé par Michael Gow, l’histoire n’est plus à Ceylon dans les temps anciens mais bien dans un endroit indéfinissable (on sait seulement qu’il y a la côte et que les gens sont Hinduis avec les femmes portent le bindi sur leurs fronts) et qu’il s’agit des temps coloniaux.

 

Au lieu d’être sri lankais comme ils l’ont été dans les autres productions de cet opéra, les deux caractères principaux sont cette fois=ci des caucasiens, ce qui fait d’eux des colonialistes dans un pays étranger. Zurga, qui se nomine, et se fait roi « élu » de la saison de pêche de perles en l’absence d’autres qui voudraient également se nominer, soit voit donné vie par la voix barytonne puissante de Grant Doyle. Dans ce rôle, Doyle apporte une profondeur et une puissance avec les tons graves dans lesquels sa voix peut plonger. Il semble par ailleurs pertinent que quelqu’un avec une telle profondeur de voix ait pu être élu roi pour une saison.

 

Son ami, Nadir, qu’il n’a pas vu depuis longtemps, est interprété par le ténor Andrew Goodwin. Goodwin atteint parfaitement des notes aiguës que même des voix de sopranos femmes auront du mal à exécuter. Des gens à côté de nous ont jasé car semble-t-il, dans les productions précédentes de cet opéra, les hommes dans le rôle de Nadir ont eu du mal à atteindre ces hauteurs vocales requises et finalement ont dû abandonner le rôle.

 

Le duo de chant de Zurga et Nadir fût un des rares des opéras. Au fond du temple saint fût un des numéros mémorables de la soirée. Tous les deux, Doyle et Goodwin ont apporté une puissance ainsi qu’une douceur en chantant sur le thème de la femme pour laquelle ils sont tous les deux tombés amoureux, et à cause de qui, ils se sont promis de ne jamais laisser une femme entamer leur amitié.

 

Mais le caractère exceptionnel de ce spectacle (et ceci sans minimiser les talents de Doyle et Goodwin) provient de la voix incroyable de Desiree Frahn qui joue le rôle de Leila. Ses sopranos ont hypnotisé le public. Leila fût la prêtresse qu’on a amenée à la côte pour bénir la saison de pêche de perles, et aussi la même femme qui a mené Zurga et Nadir à faire la promesse quant au fondement de leur amitié (ayant été ensorcelés par elle lors d’une rencontre passée). Donc Leila arrive sur scène, en tant que prêtresse inconnue et mystérieuse, habillée d’un sari orange pailleté et d’un foulard orange qui cache son visage.

 

Sa voix reste en ligne avec son innocence tout en montrant la puissance qu’elle a de pouvoir chanter toute la nuit avec comme but de calmer les démons de l’océan et d’éloigner des esprits orageux.

 

Leila est amenée par Nourabad, le profiteur, avec Pelham Andrews dans ce rôle. Andrews sans être trop dramatique ni en voix ni en action, joue, clairement, la mauvaise dans ces scènes. Même sa présence sur scène semble à elle seule menaçante.

 

Leila doit rester sous voile et pure (donc pas d’homme, malchance pour Zurga et Nadir s’ils souhaitaient rompre leur vœu) et chanter toute la nuit. Ces promesses sont mises à mal quand Nadir reconnaît sa voix chantante et que Leila, quant à elle, reconnaît Nadir par la voix et par la vue.

 

L’acte deux voit ces deux rôles réunis et puis pris. Zurga les condamne à mort dès l’aube. Il est motivé par sa propre jalousie mais aussi par les locaux (joués par la chorale de State Opera of South Australia) qui demandent leur mise à mort.

 

Dans l’acte trois, Zurga regrette sa décision. Leila arrive chez lui en lui priant d’épargner la vie de Nadir et de ne prendre que la sienne. Zurga tente de reconsidérer sa décision mais Leila commet l’erreur de lui admettre qu’elle est amoureuse de Nadir. Ceci nourrit sa jalousie et il confirme sa décision de les condamner tous les deux à mort. En se rendant compte que ses plaidoyers étaient futiles, Leila donne au garde qui l’a amenée voir Zurga un collier et lui demande de le remettre à sa mère après sa mort.

 

Zurga reconnaît le collier comme celui qu’il a donné à une femme qui lui a sauvé la vie et comprend que cette femme était Leila. Il voit donc que c’est l’occasion pour lui de sauver la vie de Leila. Zurga met le feu au village pour que Leila et Nadir puissent fuir. En faisant cela, il se sacrifie et dans la dernière scène avant la fermeture du rideau, on voit Zurga seul sur scène attendant sa punition.

 

Le décor de Robert Kemp fût convaincant. Des jeux de lumières transforment l’océan et le ciel au fond de scène d’un jour ensoleillé à une soirée orageuse. Les structures de temples étaient saillantes mais ne diminuaient pas l’histoire pour autant. Dans l’acte trois, à l’intérieur de la maison de Zurga, on voit une pièce typiquement coloniale et des chasseurs avec au moins 10 têtes d’animaux montés sur les murs.

 

Graham Abbott dirige l’Adelaide Symphony Orchestra en jouant la partition de Bizet. Il donne une nouvelle vie aux Pêcheurs de Perles. Ayant dirigé la production de Les Pêcheurs de Perles de l’Opéra Queensland, avec un délai très court à la place d’un autre chef d’orchestre l’année dernière, Abbott, non seulement connaissait la partition mais était prêt à se consacrer à la tâche.

 

Le seul reproche que l’on peut émettre sur cette production est selon moi, ce sont les surtitres. Il s’agit d’un opéra dans lequel les paroles sont parfois répétées ou sont chantées lentement, tout ce qui est chanté sur scène pourrait être traduit et transmis par surtitre.  Par exemple, dans la scène dans laquelle Nadir dit à Leila qu’il la protégera, il dit aussi qu’il est là. Le public ne voit que « I will protect you » sur les surtitres. Ceci n’est cependant qu’un petit reproche et ne doit pas réduire le fait qu’il s’agit d’une production merveilleuse.

 

Michael Gow a donné une nouvelle vie à cet opéra qui est souvent négligé (vu le succès de l’autre opéra de Bizet : Carmen) en situant l’action dans un temps colonial. Graham Abbott dirige l’orchestre avec perfection. Mon jugement est biaisé bien sûr, mais il est formidable de voir un opéra français dans ce programme vu la forte propension des opéras en langue italienne.

 

Il ne reste qu’un seul spectacle de “Les Pêcheurs de Perles” qui se jouera ce soir à 19h30. Les billets sont en vente ici.

 

Matilda Marseillaise était l’invitée du State Opera of South Australia

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