Paris à Bendigo : Entretien avec Anne-Laure Sol du Musée Carnavalet sur l’exposition Paris, Impressions de la Vie

Paris, Impressions de la vie Musée Carnavalet
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Anne-Laure Sol est la commissaire d’expositions du Musée Carnavalet à Paris qui a travaillé avec la galerie d’art de Bendigo sur leur exposition Paris, Impressions de la Vie : 1880 – 1925. Cette exposition combine des œuvres du Musée Carnavalet à Paris avec ceux qui étaient déjà à la galerie d’art de Bendigo. Et il y a meme un oeuvre prêtée du Musée Carnavalet que le Musée n’a pas encore exposé. C’est a dire que les visiteurs de l’expo à Bendigo verra cette oeuvre avant les parisiens! Il ne reste que quatre semaines pour voir l’expo Paris, Impressions de la Vie : 1880 – 1925 à Bendigo. On parle avec Anne-Laure.

Paris, Impressions de la vie Musée Carnavalet
Photo: Leon Schoots

Anne-Laure, la période que l’exposition Paris, Impressions de la Vie couvre est de 1880 jusqu’à 1925. Je vois que le Musée Carnavalet a été ouvert la même année, 1880. Est-ce que c’est pour cela que l’exposition commence sur cette date?

Non, parce que le Musée Carnavalet, vous savez, raconte l’histoire de Paris depuis le Paléolithique, c’est à dire 4000 avant Jésus-Christ jusqu’à nos jours. Donc on a choisi cette période parce qu’elle nous semblait emblématique des transformations de la ville à ce moment-là, et aussi parce que c’est une période avec laquelle on pouvait établir beaucoup de ponts avec la collection de peintures de la Bendigo Gallery, puisque vous savez qu’il y a beaucoup d’artistes australiens qui sont venus travailler à Paris à la fin du 19ᵉ et au début du XXᵉ siècle. Et donc c’est intéressant de montrer à quel point la ville était fascinante à ce moment-là. Ce qu’elle représentait comme pouvoir d’attraction pour les artistes et d’essayer de comprendre ce qui pouvait justement justifier cette fascination.

 

Le titre de l’exposition, c’est Paris, Impressions de la vie. La période impressionniste c’était juste avant ou tout au début de cette période. Normalement on dit que les tableaux des impressionnistes étaient des impressions. Est-ce que vous avez choisi ce titre pour cette raison?

Alors on n’a pas voulu dans le titre faire de références à l’impressionnisme, même si c’est un courant artistique extrêmement connu à l’étranger. Mais on a surtout voulu jouer, si vous voulez, de la polysémie du mot. Et c’est parce que dans l’exposition, comme vous l’aurez vu, on revient à la fois sur le visage de cette ville de Paris, mais aussi beaucoup sur la manière dont les Parisiens y vivent. Et donc on a voulu montrer, on a voulu avoir une approche sensible de la ville en montrant comment elle était habitée en fait, à la fois par des travailleurs, par des gens qui vont au spectacle, par des enfants, par des artistes. Et c’est plutôt c’est cette multiplicité, si vous voulez, d’usages, qu’on a voulu montrer et qui donne, je pense à l’exposition un caractère très vivant, très incarné. Voilà qui est en ce sens correspond au terme impression.

 

Ce n’est pas seulement la ville de Paris et ses structures, ses artistes, mais c’est aussi les personnes qui y vivaient à l’époque.

Absolument. C’est un visage de la ville et de ses habitants. Un portrait si vous voulez.

Musée Carnavalet Anne-Laure Sol Paris, Impressions de la vie 1880-1925
Photo: Leon Schoots

Et dans l’exposition, il y a plus de 200 œuvres. Parmi eux, il y a des tableaux, bien sûr, mais il y a beaucoup, beaucoup d’autres objets. Quels sont les autres œuvres?

Alors vous voyez ce qu’on a voulu montrer, justement, c’est aussi l’étendue des collections du Musée Carnavalet et la variété des collections qu’on conserve. C’est à dire que nous sommes un musée d’histoire et que pour raconter l’histoire de la ville, les collections du musée, elles font appel à des objets, à des éléments de mobilier urbain, à du mobilier. Et donc c’est pour ça que dans l’exposition, il y a à la fois des enseignes. Donc, vous voyez ces signes qui étaient accrochés à la devanture des boutiques pour que les gens sachent ce qu’on y vendait ou ce qu’on y trouvait. Il y a aussi une boutique. Vous avez pu voir la boutique du parfumeur Houbigant. Il y a eu également des costumes, mais qui viennent de collections australiennes, donc je suis moins à l’aise pour en parler.

 

Il y a aussi beaucoup d’affiches. Il faut imaginer que ces affiches, elles recouvraient les murs de Paris à la fin du 19ᵉ et au début du XXᵉ siècle. Donc elles rendent compte aussi de ce que les gens pouvaient voir. Et puis il y a également des objets qui sont une sorte d’ancêtre des produits dérivés, en particulier des objets qui sont liés à l’exposition universelle de 1889 et qui vous montrent que voilà, il y avait une déclinaison, si vous voulez, des images de la ville sur beaucoup de supports différents.

Et est-ce que le fait que ce n’est pas seulement les tableaux a été difficile pour le transport en Australie?

Enfin, difficile, non, ça s’organise. Mais c’est vrai que c’était une complexité supplémentaire parce qu’effectivement, vous voyez par exemple ces enseignes qui sont très grandes, très lourdes. Il fallait prendre des précautions particulières pour les pour les déplacer. La même chose pour les objets, les éventails, les assiettes. Voilà, tout ça, c’est des objets qui demandent des soins particuliers.

Musée Carnavalet Galerie d'art de Bendigo Paris Impressions de la vie
Photo: Leon Schoots

Est ce que tout a été bien arrivé?

Parfaitement arriver.

Heureusement. Comment est-ce que vous avez choisi les œuvres qui font partie?

Assez vite on a partagé avec l’équipe de Bendigo qui a été formidable pour tout ça parce que très ouvertes. Ils sont d’abord venus voir le musée. Donc ils ont compris aussi comment les choses étaient organisées ici et la richesse des collections. Et assez vite, on leur a proposé de construire un projet qui soit comme une promenade. Si vous voulez, une promenade dans la ville et une promenade qui fasse appel effectivement à différents types d’objets. Et donc on a fait des propositions et le musée de Bendigo a retenu certaines des propositions en fonction de ce qu’eux aussi voulaient raconter à leur public et puis bien sûr, de leur espace.

 

Est-ce que l’exposition qu’on voit à Bendigo en ce moment, c’est une exposition que vous avez faite vous-même à Paris? Vous avez déjà proposé ça au public parisien?

Non, c’est une exposition qui est montrée pour la première fois. Elle a été faite pour Bendigo.

 

Comment est-ce que ce partenariat a commencé en fait? Est-ce que Bendigo voulait faire quelque chose de parisien? Est ce qu’ils voulaient vraiment faire quelque chose avec votre musée dès le début.

Ils voulaient vraiment faire quelque chose avec notre musée parce qu’ils sont venus nous voir et ça s’est très bien passé tout de suite. Donc je crois que c’est une alchimie qui a bien fonctionné. Alors il y a plusieurs raisons à mon avis. C’est, comme je vous le disais, la présence dans les collections du musée de Bendigo d’artistes australiens qui sont venus à Paris. Je pense que ça a établi un lien. Et puis, je pense le musée de Bendigo est un musée qui a eu une connexion assez forte avec la ville. Vous voyez, c’est un musée qui se trouve au cœur de la ville. Il y a une dimension affective de la part des habitants de Bendigo pour leur musée. Et donc ce musée, il est au cœur de la ville et donc c’est en ça, il est assez proche du Musée Carnavalet qui raconte aussi une histoire des habitants, une histoire sensible. Et donc je pense qu’il y avait une approche commune. Et donc c’est pour cela que ça, ça a bien fonctionné.

 

C’est bien. Et est-ce que c’était la première fois que vous avez travaillé avec eux?

Oui.

 

Et est-ce que le Musée Carnavalet a déjà fait des expositions avec d’autres villes en Australie?

Non, c’est la première fois.

Photo: Leon Schoots
Photo: Leon Schoots

Bendigo, comme vous aurez vu, quand vous êtes venue, n’est pas une grande ville, donc c’est vraiment quelque chose de bien pour être la première ville australienne de travailler avec vous.

C’est formidable. On était très heureux tout ça et on a été très très bien accueilli. Ça s’est vraiment bien passé. C’est bien comme je vous le disais, il y avait vraiment une communauté de vue, on avait envie de raconter la même histoire.

 

Oui, c’est très bien. Et en fait, ça a pris combien de temps depuis le premier contact et le commencement de l’expo?

Un peu moins de deux ans.

 

C’est court quand même parce que normalement ça prend des années et des années quoi. Donc après la COVID, vous avez commencé de parler.

Ouais, absolument.

 

Est-ce qu’il y a les objets qu’on trouve dans l’exposition que vous, vous même auriez aimé voir encore dans les rues de Paris?

Et bien, si vous voulez, ces enseignes par exemple, c’est vrai qu’elles viennent des rues de Paris. Alors il y en a encore, on peut encore en voir, mais il y en a quand même beaucoup moins qu’avant. C’est vrai que c’est un souvenir de la ville que nous on aime beaucoup parce que ça raconte bien l’histoire de la ville à un certain moment. Je ne sais pas si vous êtes déjà venu au Musée Carnavalet.

 

Non, pas encore, malheureusement.

Et bien, j’espère qu’un jour vous viendrez, Vous verrez que nous avons deux salles. Les salles d’introduction du musée qui sont consacrées à ces enseignes. Elles sont accrochées comme elles l’étaient dans les rues de Paris.

 

Quelles sont les objets de l’exposition qui sont vos préférés et qui sont selon vous, à ne pas manquer?

Alors il y a une affiche d’un artiste qui s’appelle Manuel Orazi pour l’hippodrome. Je ne sais pas si vous l’avez vu, une très, très grande affiche.

Photo: Leon Schoots
Photo: Leon Schoots

En fait, je n’ai pas encore été à Bendigo parce que je ne suis pas en Victoria. Mais j’espère pouvoir y aller avant juillet.

D’accord. Alors donc, il y a cette très grande affiche pour l’hippodrome qui se trouvait boulevard de Clichy, qui est une affiche magnifique, très, très grande. Tellement grande que nous, on n’a pas souvent l’occasion de la montrer au Musée Carnavalet. On était vraiment très heureux de pouvoir le faire.

Et puis il y a aussi un tableau magnifique d’Abel Truchet qui s’appelle Le Bal des quat’z’arts et qui est aussi un tableau qu’on a acheté il n’y a pas très longtemps et qui est un chef d’œuvre de la peinture du début du XXᵉ siècle, qui montre un grand bal des étudiants de l’Ecole des Beaux-Arts dans le Moulin-Rouge. Et on le montre à Bendigo pour la première fois. On ne l’a pas encore montré au Musée Carnavalet et donc c’est une avant-première qui nous fait très plaisir.

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Louis Abel Truchet 1857 1918 Bal des Quat zArts c.1903 oil on canvas signed on the bottom right 100 x 148 cm. Friday 12 June 2020, Marseille. MaisonRC associated auctioneers

Donc on voit ça avant les Parisiens d’aujourd’hui !

Oui, absolument.

 

Et pour vous connaître un peu mieux. Quel a été votre parcours avant de travailler au Musée Carnavalet?

Moi, je travaille depuis longtemps maintenant. Pour dire un peu vite, j’ai longtemps dirigé un musée dans une petite ville près de Paris, à l’Isle-Adam, petite ville comme Bendigo en fait. Et c’était très agréable. Et j’ai fait ça pendant une dizaine d’années. Et puis ensuite je suis venu travailler au Musée Carnavalet.

 

Et là, vous êtes commissaire d’exposition. Est-ce que vous avez étudié l’art ou l’histoire, ou les deux?

Bien sûr, j’ai fait des études à la fois de littérature et d’histoire de l’art. Je suis responsable du département des peintures et des vitraux.

 

Et pourquoi vous avez décidé de travailler dans les musées et dans l’art?

Écoutez, moi, j’ai eu beaucoup de chance. J’ai été élevé dans une famille où l’art était quelque chose de très important et on nous a beaucoup appris à regarder, on nous a beaucoup fait voyager, etcetera quand on était jeunes filles. Et c’est vrai que je pense que ça a forgé mon goût.

 

Est-ce que vous étiez très créatif en tant que en tant qu’enfant?

Non, pas très créatif, mais en revanche, j’ai toujours aimé effectivement apprendre, regarder, découvrir. J’ai toujours aimé fréquenter les musées, donc c’est quelque chose qui ne m’a jamais quitté.

 

Donc vous avez toujours apprécié l’art.

Toujours.

 

Est ce qu’il y a d’autres choses qu’on n’a pas couvert sur l’exposition que vous souhaitiez me dire?

Vraiment, je pense qu’il faudrait vraiment que vous puissiez voir cette exposition. Et en plus, je vois qu’il se donne aussi beaucoup de mal pour avoir des animations sur la culture française autour de l’exposition, il y a beaucoup d’invités, d’ateliers pour les familles, voilà. Et donc, je trouve que c’est plus qu’une exposition, c’est vraiment une expérience de la vie parisienne qui est proposée à Bendigo jusqu’au 14 juillet.

 

Oui.  Et après ça, tous les tous les œuvres reviennent en France, chez vous?

Absolument.

On remercie Anne-Laure et le Musée Carnavalet pour cette interview et nous espérons pouvoir nous rendre à Bendigo pour voir l’exposition Paris : Impressions of Life 1880 -1925.

Photo: Leon Schoots
Photo: Leon Schoots

INFOS CLÉS POUR PARIS : IMPRESSIONS OF LIFE 1880 -1925

QUOI : L’exposition Paris: Impressions of Life 1880 – 1925

QUAND : jusqu’au 14 juillet 2024

OÙ : La Galerie d’art de Bendigo

COMMENT : Achetez vos billets par ce lien.

COMBIEN : Les prix des billets sont les suivants :

  • Adultes 30 $
  • Carte Concession 25 $
  • Bendigo Art Gallery Member 20 $
  • PGAV Member 20 $
  • ICOM Member 20 $
  • Enfants 5 à 18 ans 15 $
  • Family (2 adultes + 2 enfants)  75 $
  • Enfants sous l’âge de 5 ans GRATUIT

 

Est-ce que vous avez déjà visité le Musée Carnavalet ? Ou la Galerie d’art de Bendigo?

 

Consultez notre rubrique Que faire en juin pour découvrir tous les évènements ayant liens avec la France et la Francophonie qui se déroulent en Australie ce mois-ci.

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Matilda Marseillaise

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