MUSIQUE: Interview avec Youssou N’Dour avant ses concerts en Australie cette semaine

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J’ai parlé avec Youssou N’Dour avant qu’il parte de Dakar pour ses concerts en Australie cette semaine (infos et billets à la fin de l’article)

Youssou Ndour sitting on a step looking to camera
Image prise du site de Sydney Opera House

 

Ça fait 30 ans que vous êtes dans le business de musique. Comment pensez-vous avoir pu rester si longtemps dans ce milieu?

C’est vrai que ça fait 30 ans mais chaque jour, que c’est ma passion, j’ai l’impression que ça vient de commencer. Et les idées sont là, les échanges sont là, parce que c’est une démarche aussi d’échange avec les gens. Je respecte ma musique locale, sénégalaise, aussi et dans les rencontres qu’on peut avoir. Tout cela forme un ensemble de choses qui vous motivent, qui vous gardent à jour et qui vous laissent parfois… Il y a ma musique et puis le showbiz mais ça va à part.

 

J’ai remarqué que les chansons africaines ont toujours un message par rapport aux chansons en anglais qui sont parfois n’importe quoi. Pensez-vous que c’est donc naturel d’avoir chanté des chansons qui ont un message que vous êtes maintenant dans la politique? Est-ce que c’était une progression naturelle?

Oui. D’abord nous avons une société qui a une culture orale. C’est-à-dire qu’on a beaucoup plus des paroles. Dans cette société là nous utilisons des chansons pour prendre des raccourcis, parler des choses qui nous plaisent et des choses qui nous déplaisent. Des avertissements. On fait des fois comme le rôle de la presse.  On a une chanson avec des mots, avec tout et ça c’est un petit peu le démarche en Afrique qui permet quelqu’un d’écouter de la musique et d’écouter les idées et de l’influencer etc. Je pense que c’est la réalité à la même ligne on a trouvé ça ici. Maintenant, dans le cadre politique, il faut comprendre que moi, je vis au Sénégal. Je n’ai jamais vécu ailleurs. Je vis au Sénégal. Je m’habille comme eux, j’habite chez eux, je vis comme eux. Je les considère comme moi.

Image prise du site France 24 http://www.france24.com/en/20120405-youssou-ndour-macky-sall-senegal-cabinet-culture-tourism-minister

 

Donc vous avez toujours vécu là? J’avais lu que vous étiez basé à Paris maintenant.

Oui donc je suis basé ici et quand je vois que je peux agir par mon expérience, par mon réseau, par ma façon de faire, de lancer des messages, mais aussi quelqu’un qui participe. Vous savez que la politique c’est l’affaire de la cité. Si vous n’êtes pas concerné, les décisions vous impactent. C’est ça et bon ma vision politique est très (orienté) citoyen. Un citoyen qui veille et qui donne son nom, qui est là, qui parle quand il faut parler. Il y a beaucoup, beaucoup de choses à faire en Afrique et je pense que la musique peut participer comme d’autres choses.

 

Et en ce moment le rôle que vous avez –

Je suis ministre Conseiller du Président de la République de Sénégal. Conseiller, ce qui me permet de faire le conseil, transversalement sur toutes les questions. Et après, je peux aussi en même temps, ce que je n’ai pas pu faire quand j’étais en charge le Ministre de la Culture, avoir un département on n’a pas le temps. Etant conseiller j’ai plus de temps, ça me permet de continuer ma passion.

 

Et vos chansons sont en wolof?

C’est le wolof d’une manière générale qui est à la base. Il y a un peu d’anglais dans les chansons mais c’est le wolof qui est à la base.

 

Comment pensez-vous que vous avez pu avoir autant de succès dans les pays ou on ne parle pas le wolof?

Vous savez la musique c’est d’abord une langue. C’est peut-être la première langue. De côté-là, je n’ai pas de problème! A travers la musique, on peut laisser la musique parler. Cette histoire de langue c’est vrai, c’est une réalité. Mais je ne pense pas que ce soit un problème pour toucher les gens. La musique, comme j’ai vu c’est une langue, c’est la première langue.

 

Donc ça réunit tous les gens.

Oui.

 

Quel est le message dans votre dernier album « Seenie Valeurs » ?

Le dernier album c’est quelque chose qui parle de l’Afrique. J’ai pu faire beaucoup, beaucoup de rencontres avec la musique et j’ai finalement fait un choix de faire appel aux plus jeunes. C’est-à-dire qu’en Afrique nous avons de la musique moderne urbaine qui celle des plus jeune et j’ai voulu faire un plan B à ces jeunes-là parce que vous savez en Afrique nous sommes 60% de la population a moins de 25 ans. C’est très important de parler aux jeunes. C’est un plan B pour parler aux jeunes. Et deuxième chose, c’est pour dire que l’Afrique a des voix pour parler pour elle pour le reste du monde. Donc je ne parle pas seulement aux causes africaines. J’ai parlé aussi sur cet album de comment nous sommes, de comment nous voulons être perçus et ça c’est quelque chose de très important aussi, quoi.

 

 

Vous allez faire deux concerts en Australie, un à BluesFest et l’autre à Sydney Opera House et vous venez avec votre groupe, le Super Etoile de Dakar. Est-ce que vous êtes venu avez eux lors de vos concerts à WOMADelaide il y a quelques années?

80% du groupe qui était venu à Adélaïde, vient avec moi.

 

Pour les gens qui vous n’avez pas vu en concert ni vu le Super Etoile de Dakar, a quoi est-ce qu’ils doivent s’attendre du concert?

Du concert, c’est d’abord les chansons classiques, qu’on connait très bien. C’est-à-dire 7 seconds, Birima, etc. Et ensuite, tout ce que nous avons sorti, des albums, nous avons le nouveau répertoire, nous allons garder toujours l’empreinte de la musique traditionnelle, comme les percussions. Ce sont des percussions sénégalaises qui jouent un rôle très important.

 

En fait quand vous avez parlé de la musique là, vous avez dit 7 seconds, ça c’est, je pense au moins à l’extérieur de l’Afrique, la chanson pour laquelle on vous connaît tous. Vous avez collaboré avec beaucoup de gens comme Peter Gabriel, Paul Simon. Pourquoi pensez-vous que c’est cette chanson-là qui a eu tellement du succès?

Je ne sais pas comment on fait un tube, je sais comment on fait un album. C’était une soirée extraordinaire parce que Neneh voulait vraiment qu’on chante ensemble, moi aussi. Et après on s’est retrouvé, on fait la chanson, ensuite on s’est dit que c’était une grande chanson. Effectivement ça a pris, on voit comment une seule chanson peut être une fenêtre le reste de votre carrière, de votre musique, pour votre pays, pour votre continent.

 

 

Et est-ce que vous avez d’autres collaborations à venir?

Rien pour l’instant mais tout le monde connaît ma réputation qui est d’échanger. Cette démarche-là est toujours en moi. Nous avons dans les années 80 fait cela avec Paul Simon. C’est là, sans le faire exprès, que nous avons créé ce qu’on appelle la World Music. La World music, ce n’est pas une musique africaine, c’est l’anglo-saxon amène quelque chose, l’africain amène quelque chose, celle de l’Asie, du Pakistan etc. C’est l’ensemble qui crée la World Music.

 

Comme par exemple les musiciens de partout dans le monde comme quand vous étiez à WOMADelaide…

Voilà, c’est ça!

 

Je vois que vous avez été primé pour le Praemium Imperiale récemment. Félicitations pour cela. J’imagine que vous avez gagné beaucoup de beaucoup de prix dans votre vie. Quel prix est le plus important pour vous?

Très difficile, car à chaque fois que je reçois un prix, c’est pour moi un encouragement. Je ne cours pas pour chasser les prix, mais c’est une reconnaissance, cela veut dire que je peux continuer sur cette lancée qui est de vivre de votre passion. Ca je pense, c’est quelque chose de très, très important. Maintenant dire que l’un est plus important que les autres, non! Je pense que tous les prix sont importants. Le dernier c’est le Praemium c’est vrai, on en a beaucoup parlé. Tous les prix m’ont toujours encouragé, ils me gardent proche de ma passion.

 

Qu’est-ce que vous avez prévu pour le futur?

Pour l’instant nous allons tourner en Australie, au Brésil, en Côte d’Ivoire, à Paris. Donc c’est la continuation de toute cette tournée que l’on a démarré l’année dernière en Europe. Après, il n’y a pas tout de suite de projet prévu. Pour l’instant c’est les concerts. Après on verra. Si on sent qu’au niveau de l’inspiration, il y a quelque chose qui nous permet d’engager l’enregistrement d’un nouvel album, on le fera. Mais bon, pour l’instant rien n’est prévu, en tout cas calculé ou pas.

 

Une tournée mondiale prend combien de temps?

On a tout le mois de mars, après on fait une pause, après l’été pour les festivals. Nous avons aussi des programmes au niveau local, en Afrique.

 

Donc vous bougez beaucoup!

Oui, c’est ça. A très bientôt en Australie.

 

Vous pouvez voir Youssou N’Dour et le Super Etoile de Dakar à Sydney Opera House mercredi 28 mars et au BluesFest ce vendredi 30 mars.

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Matilda Marseillaise

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