Bernadette Robinson Divas à l’Adelaide Cabaret Festival : dix divas, 105 minutes, une femme

CRITIQUE Bernadette Robinson Divas
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Hier soir, le public d’Adélaïde a eu droit à une interprétation virtuose de chant et de théâtre au Her Majesty’s Theatre, où les Divas de Bernadette Robinson ont occupé le devant de la scène dans le cadre de l’Adelaide Cabaret Festival.

CRITIQUE Bernadette Robinson Divas
Photo: Naomi Jellicoe

Derrière elle, des portraits pop art à la Andy Warhol représentant dix femmes légendaires donnaient un aperçu visuel des transformations à venir. Chaque fois que Robinson endosse un nouveau personnage, un éclairage subtil met en valeur le portrait correspondant, aidant discrètement le public à faire le lien, même si les changements vocaux et physiques suffisent amplement.

 

À travers six microphones répartis sur la scène, Robinson se déplace avec aisance, sans avoir besoin de perruques ni de changements de costumes. Sa capacité à se métamorphoser vocalement et physiquement (via ses manières) en chaque diva est étonnante. Fermez les yeux, et vous jureriez que les dix femmes se produisent en direct sur cette scène.

 

Le spectacle s’ouvre sur la voix aiguë caractéristique de Kate Bush interprétant Wow, accompagnée de ses gestes caractéristiques. La structure du spectacle reste cohérente tout au long : une chanson pour nous transporter dans l’univers de chaque diva, suivie de réflexions sous forme de monologue dans leur voix parlée (par la bouche de Robinson). Bush réfléchit à la façon dont Cathy, le personnage de Wuthering Heights, vit en elle lorsqu’elle chante.

 

Shirley Bassey suit, interprétant de manière dramatique Diamonds Are Forever avec un long et puissant « foreverrrrrr ». Robinson partage le chagrin de Bassey suite à la mort de sa fille, comment elle a fait son deuil à travers ses cordes vocales et trouvé du réconfort en retournant sur scène. This Is My Life clôt cette partie avec une grandeur provocante.

 

Vient ensuite Karen Carpenter, délicatement présentée par le groupe qui chante Close to You. La voix de Carpenter rappelle l’image irréprochable du duo, qui n’a pas nui à leur succès, puisqu’ils ont vendu cinq millions de disques. Rainy Days and Mondays mène à une réflexion crue sur les régimes obsessionnels, se terminant par la phrase glaçante « la seule façon d’arrêter, c’est de mourir ».

Bernadette Robinson Divas
Photo: Naomi Jellicoe

Vient ensuite Edith Piaf, dont le défiant Je ne regrette rien laisse place à des réflexions sur les hommes et l’amour. Une chanson moins connue, La Belle Histoire d’Amour, offre un moment poignant avant que Piaf ne déclare qu’elle vit dans le présent, annonçant un retour triomphal à Je ne regrette rien. Il convient de noter que la maîtrise du « R » français par Robinson, difficile pour les non-francophones, est impeccable.

 

Dans un revirement abrupt mais délicieux, nous rencontrons Dolly Parton, avec son accent traînant du Sud et son charme strass et paillettes. Robinson, dans le rôle de Dolly, dit avec espièglerie à propos de son mari : « Carl me laisse faire ce que je pense être juste et je laisse Carl faire ce que je pense être juste. » Elle chante Dumb Blonde et raconte l’histoire douce-amère de sa séparation avec son manager, l’homme pour lequel elle a écrit I Will Always Love You, devenu plus tard emblématique grâce à Whitney Houston et au film The Bodyguard.

 

Puis Miley Cyrus, la filleule de Dolly, fait irruption avec Wrecking Ball. Miley confie que la musique est son refuge et admet : « J’ai peut-être fait trop la fête, mais j’ai survécu. » Son hymne féministe Flowers délivre un message surprenant et stimulant avec la phrase : « Je peux m’aimer mieux que toi. »

 

Le ton change lorsque Barbra Streisand entre en scène avec Memory, tiré de Cats. Elle se souvient avoir voulu devenir actrice et avoir accepté un emploi de chanteuse dans une boîte de nuit uniquement pour l’argent, jusqu’à ce qu’elle réalise qu’elle pouvait jouer à travers la chanson en créant des personnages. Robinson interprète I Am the Greatest Star (Funny Girl), puis Being Alive (Company), résumant la quête d’authenticité de Streisand : « Jouer, c’est croire que je suis à la hauteur. »

 

Des comédies musicales à l’opéra, Robinson incarne ensuite Maria Callas dans une transformation vocale époustouflante. Dans le rôle de Callas, elle réfléchit à la douleur causée par les critiques publiques : « Personne ne pensait à quel point leurs paroles pouvaient me détruire. » Viennent ensuite des interprétations puissantes de Suicidio ! de La Gioconda et La donna è mobile. À propos de sa relation amoureuse tumultueuse avec Aristote Onassis, elle sourit : « Je ne regrette pas tout. »

 

En contraste total avec l’opéra, Amy Winehouse arrive, avec son accent cockney et sa fierté blessée. Après la partie consacrée à Callas, Back to Black semble terriblement approprié. Robinson comme Winehouse admet des émotions qu’elle ne veut pas affronter et la conviction qu’« il faut souffrir pour son art ». Rehab et You Know I’m No Good font passer le message avec une honnêteté brute.

 

Enfin, nous rencontrons Judy Garland. Elle se moque d’être qualifiée de capricieuse : « Je n’ai pas les moyens de me permettre d’être capricieuse », dit-elle, avant de déclarer que le seul mal qu’elle ait jamais fait est d’avoir chanté Over the Rainbow. La solitude plane dans l’air lorsqu’elle chante The Man That Got Away. Mais il y a aussi la rédemption, dans sa connexion avec le public et dans son dernier numéro : There’s No Business Like Show Business.

 

Ce qui unit les divas incarnées par Robinson, ce n’est pas seulement la célébrité, c’est aussi les sentiments. Le chagrin, la toxicomanie, la solitude et la résilience sont des thèmes récurrents dans bon nombre de leurs histoires. Karen Carpenter, Amy Winehouse, Miley Cyrus et Maria Callas ont lutté contre des troubles et la toxicomanie (même si la toxicomanie de Callas n’est pas mentionnée). Shirley Bassey et Edith Piaf ont subi des pertes dévastatrices (même si celles de Piaf ne sont pas mentionnées). Judy Garland a souffert de l’attention du public et de chagrins personnels.

 

Même celles dont les histoires ne sont pas marquées par la tragédie, comme Barbra Streisand, Dolly Parton et Kate Bush, apportent à leur art une honnêteté émotionnelle, une audace et une individualité. Sous des traits de Robinson, chaque femme est célébrée autant pour sa complexité que pour sa voix.

 

Passer de Kate Bush à Edith Piaf, de Maria Callas à Miley Cyrus en moins de deux heures (sans entracte) est un exploit remarquable. Bernadette Robinson : Divas n’est pas un simple spectacle d’imitation : c’est une véritable maîtrise de l’incarnation vocale et émotionnelle. Il est vraiment étonnant de voir avec quelle facilité Robinson change non seulement de voix, mais aussi de personnalité, de l’accent à la posture, du ton au timing. Un instant, elle est toute en impertinence sudiste ; l’instant d’après, elle est une reine de l’opéra. Sa capacité à traverser les genres musicaux et les univers émotionnels est tout simplement extraordinaire.

 

De Je ne regrette rien à Suicidio !, de Dumb Blonde à Back to Black, Robinson ne se contente pas d’interpréter ; elle disparaît dans ces femmes et laisse leurs voix s’élever à nouveau. Bernadette Robinson Divas n’est pas un concert de reprises. C’est une célébration de la survie, de la performance et des femmes extraordinaires qui ont osé chanter leur vérité. Au cœur de tout cela se trouve le don extraordinaire de Robinson : la rare capacité de canaliser dix divas en une seule soirée avec élégance, empathie et une précision vocale étonnante.

5 CROISSANTS

Matilda Marseillaise était invitée de l’Adelaide Cabaret Festival

 

Le spectacle a été présenté au festival pendant une seule soirée.

 

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