Emma Benestan nous parle de son film « Fragile » : un « Dirty dancing à l’algérienne »

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Emma Benestan est la réalisatrice du film « Fragile » qui fait partie du programme du Screenwave International Film Festival qui a commencé à Coffs Coast hier et continuera jusqu’à 6 mai.

Emma Benestan film Fragile

Nous avons interviewé Emma Benestan à propos de ce film « Fragile ». Lisez-le par la suite.

 

Votre film Fragile (ou titre en anglais Hard Shell, Soft Shell) sera projeté au Screenwave International Film Festival en Australie à la fin du mois. Comment décrierez-vous ce film?

Je dis souvent en rigolant que j’ai fait ce film pour donner envie aux gens d’être amoureux et de manger des huîtres. Donc j’aurais envie de dire ça, tout simplement.

 

Pourquoi avez-vous décidé de réaliser ce film?

En tant que française issue de l’immigration algérienne, je ne voyais pas assez de représentations positives et romantiques des jeunes issus de cette diversité dont je fais partie. J’en avais marre des films aux sujets sociaux qui parlaient toujours des mêmes problèmes, et j’avais envie de faire un « Dirty dancing à l’algérienne ». De montrer des filles libres avec elle-même et des garçons fragiles et empêtrés dans leurs contradictions.

Hard Shell Soft Shell/ film Fragile

 

Vous avez dit que le film Fragile est « une histoire d’amour inversée. Le chagrin d’amour s’abat sur un homme et non pas sur une femme, contrairement à la majorité des comédies romantiques. » Pourquoi avez-vous décidé de faire un film d’une histoire d’amour inversée?

J’avais envie de faire une romcom inversée, où tout ce qui d’habitude se passe pour le personnage féminin arrive à un personnage masculin car je trouve que le féminisme actuel doit aussi passer par l’interrogation des représentations masculines, ce qu’on ne fait pas assez je trouve. C’est un vrai combat je pense à mener, et il faut proposer des films où les hommes sont aussi vus autrement. Virginie Despentes, une écrivaine, dit que l’injonction à la virilité est aussi forte que l’assignation à une certaine féminité. C’est de cette injonction-là dont je voulais m’amuser avec Fragile.

 

Est-ce que le film Fragile est le premier long-métrage que vous avez écrit? Est-ce que la COVID a empêché d’autres projets?

C’est le second que j’ai écrit. Mais le premier était vraiment très différent, c’était un film beaucoup plus sombre, qui parlait de thématiques intime. Mais j’ai arrêté l’écriture car c’était douloureux. C’était deux ans avant le Covid. Et j’ai écrit Fragile pour aller vers quelque chose de plus léger, de plus solaire et m’amuser aussi. La COVID n’a pas empêché le projet de Fragile car nous avons tourné entre deux confinements.

 

Est-ce que les personnages sont inspirés par des gens que vous connaissez? Est-ce que l’un d’entre eux a des mêmes traits de caractère que vous?

Oui, le personnage de la grand-mère est un hommage à ma grand-mère paternelle. Comme le rôle d’Az est vraiment inspiré de mon père. Il a grandi dans une famille entourée de femmes, c’était le seul homme, et c’est quelqu’un de très romantique et qui pleure facilement. Et j’ai toujours trouvé ça beau et touchant. Loin des clichés habituels, des pères maghrébins violents ou machistes vus dans la majorité des films français, ce que je trouve déplorable.

film Fragile / film Hard Shell Soft Shell

Pourquoi avez-vous choisi Sète pour l’endroit où le film se déroule?

Je suis née à 30 minutes de Sète, j’y ai passé mes étés adolescents et quand je suis revenue pour des repérages ça a été comme une évidence. Les ostréiculteurs qui côtoient les stars du petit écran : il n’y a qu’à Sète qu’on voit ça !

 

Il s’agit de votre premier long métrage. Parlez-nous un peu de cette expérience par rapport a vos expériences de faire des courts-métrages?

Les courts métrages m’ont permis d’expérimenter ma manière de travailler, en essayant toujours d’être au plus proche des acteurs, en intégrant des endroits d’improvisations et des répétitions intenses. Ça m’a aussi permis de rencontrer mes collaborateurs artistiques.

 

Qui a choisi le titre en anglais «Hard Shell, Soft Shell»? Pourquoi ce titre ? Vu que le mot fragile existe aussi en anglais et a les mêmes significations qu’en français?

C’est le vendeur international qui a eu la bonne idée de faire un sondage avec plusieurs titres et c’est celui qui a été retenu. J’ai trouvé que ça correspondait vraiment bien au film. Il y a l’idée de la délicatesse, de la coquille et de la douceur. J’en étais très contente.

 

 

Parlez-nous un peu du travail que vous avez fait avec l’association 1000 visages? Les amis d’Az sont joués par quelques acteurs de cette association, je crois?

J’ai animé des ateliers pour l’association pendant plusieurs années avec des jeunes issus de quartiers populaires. Cette expérience a été très forte pour moi car on s’amusait beaucoup, on créait beaucoup de choses sur le plateau, on essayait des choses de manière décomplexée, surtout avec un goût du langage, du corps, du geste. J’y ai fait la rencontre d’une grande partie des acteurs de Fragile.

Hard Shell Soft Shell/ film Fragile

 

Quel niveau d’expérience ont-ils eu ces acteurs de l’association 1000 visages et comment a été votre expérience de travailler avec eux sur votre film Fragile?

Ils ont tous des expériences de jeu très différent, certains avaient fait plusieurs tournages pros déjà, d’autres non. Mais ils avaient tous une envie forte de faire le film car on aimait l’idée de travailler tous ensemble. C’était un plaisir de bosser avec chacun , et on a vraiment créé une ambiance très soudée pendant le tournage.

 

Vous avez déjà travaillé avec Oulaya Amamra (qui joue Lila dans ce film) sur votre court-métrage Belle Gueule mais comment avez-vous choisi les autres comédiens qui jouent dans le film Fragile?

Je les connaissais presque tous car ils viennent de 1000 visages, je les ai choisis car j’avais envie de les filmer, et qu’après des courts métrages faits en amateur avec certains, c’était important pour moi de continuer vers un film plus professionnel.

 

Depuis quand intéressez-vous dans le monde du cinéma et quand est-ce que vous avez décidé de le faire comme métier?

Depuis petite, par mon père, qui est un grand cinéphile.

 

Vous avez travaillé dans plusieurs domaines du cinéma … Avez-vous un rôle préféré? Avez-vous trouvé que le fait de travailler dans tant de domaines différents du cinéma a enrichi vos connaissances et vous a permis de réaliser des films différemment avec cette perspective?

Oui bien sûr. Surtout mon travail en tant que monteuse. J’ai appris beaucoup en regardant les rushes des réalisateurs ou réalisatrices avec qui j’ai travaillé et ça m’a beaucoup nourri dans mon travail pour la suite.

 

À l’inverse, est-il difficile de ne pas trop s’impliquer dans ces autres aspects de la réalisation d’un film lorsque vous êtes le réalisateur et que quelqu’un d’autre joue ces rôles?

Non je ne crois pas. Tout dépend après de la personne avec qui vous travaillez. Je fais confiance aux collaborateurs artistiques avec qui je travaille, même si bien sûr, parfois je suis exigeante sur ces étapes-là, par exemple comme le montage. Mais Perrine Bekaert, que j’ai rencontré sur La vie d’Adèle de Kechiche est d’une délicatesse et d’une intelligence rare, et j’adore travailler avec elle.

 

De même, vous avez également joué la comédie. Votre expérience d’acteur a-t-elle influencé votre écriture et votre mise en scène? 

Non, car je l’ai vraiment fait une seule fois pour une amie d’ailleurs qui pensait que le rôle était fait pour moi. Mais par contre, je donne toujours

 

Avez-vous d’autres films en cours?

Oui. J’ai un projet de film fantastique en Camargue que j’espère vraiment tourner l’an prochain et un projet de série en cours.

 

D’autres choses que vous souhaitez nous dire sur le film Fragile?

J’espère que les gens le verront et qu’ils auront envie d’être fragile aussi, du moins de l’assumer. Jean Claude Carrière a dit : Oui à la fragilité, parce qu’elle nous rapproche les uns des autres, alors que la force nous éloigne.

Nous remercions Emma Benestan pour cette interview.

 

Fragile sera projeté au Screenwave International Film Festival le 29 avril à Jetty Memorial Theatre.

 

INFOS CLÉS POUR SCREENWAVE INTERNATIONAL FILM FESTIVAL

QUOI: Le Screenwave International Film Festival, dont il y a 13 films français au programme y compris Fragile

QUAND: du 21 avril au 6 mai

OÙ: Jetty Memorial Theatre, Coffs Coast, NSW

COMMENT : Achetez vos billets par le site web

COMBIEN:

Les prix pour un billet simple:

  • Local 245 17,50 $
  • Full 21,00 $
  • Sous l’âge de 25 10,00 $
  • Concession 17,50 $

 

Il existe également des forfaits pour voir plusieurs films:

  • 6 Film Pass: 99 $
  • 12 Film Pass: 179 $
  • 20 Film Pass: 259 $

 

CRITIQUES DES FILMS DE SCREENWAVE

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